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Le risque du trouble anormal de voisinage est réparable
Cass. Civ. 3ème, 1er mars 2023, n°21-19.716.
La Cour de cassation a rappelé, par un arrêt en date du 1er mars 2023, la possibilité d’une action préventive, en cas de simple risque d’un trouble anormal, à la condition d’établir la certitude de ce dommage futur.
Dans cette affaire, les propriétaires d’une maison sont avoisinants d’une parcelle sur laquelle se trouvent six cèdres.
Les propriétaires assignent leurs voisins aux fins d’abattage des six cèdres et en indemnisation du préjudice subi sur le fondement de la théorie des troubles anormaux du voisinage.
La Cour d’appel a fait droit à leur demande et a ordonné l’abattage des arbres, dont la hauteur et l’ampleur du feuillage présentent le risque, en cas de tempête, d’endommager gravement la maison d’habitation des propriétaires.
Ces risques certains s'étaient déjà réalisés en 2020 à l'occasion d'une tempête.
Les propriétaires des arbres ont formé un pourvoi en cassation, estimant notamment qu'un risque ne constitue un trouble réparable sur le fondement des troubles anormaux du voisinage que si la probabilité de réalisation de ce risque est élevée, et non si la réalisation de ce risque n'est qu'une simple éventualité.
L’existence d’un trouble actuel et certain doit être caractériser.
La Cour de cassation rejette le pourvoi.
Pour la Cour de cassation, l’appréciation de l’anormalité du trouble est une question de fait relevant de la libre appréciation des juges.
La Cour de cassation a jugé que la Cour d’appel a caractérisé l’anormalité du trouble en relevant que la présence des arbres présentait un danger pour la sécurité des biens, constitutif d’un trouble anormal du voisinage.
Le maintien en l’état des arbres, ayant atteint une hauteur et une ampleur « excessives », aurait fait prendre aux propriétaires actuels de la parcelle litigieuse le risque certain de voir leur bien endommagé en cas d’incident climatique. Ce risque certain de chute excède les inconvénients normaux de voisinage.
Ce qui compte c’est la réalité et l’anormalité du trouble émanant d’une propriété située dans le voisinage. De sorte qu’il n'est pas nécessaire de démontrer la faute du propriétaire du fonds à l’origine du trouble, lequel peut par exemple engager sa responsabilité quand bien même il ne résiderait pas sur le fonds affecté par les nuisances (Civ. 2e, 28 juin 1995, n° 93-12.681).
Le dommage, s’il ne s’est pas déjà réalisé, redevient réparable lorsque au lieu d’être seulement éventuel, purement hypothétique, apparaît nettement probable : la certitude du risque pris rend le trouble allégué réparable (v. déjà Civ. 2e, 24 oct. 2019, n° 18-20.701, à propos du risque d’effondrement d’un mur).